La saga d'Hadès - Tome 01 : A game of fate

Combien de temps avant que Zeus n’interdise son mariage avec Perséphone, et pire encore, avant qu’il ne la marie à un autre ?

Hadès avait conscience que ses inquiétudes étaient égo?stes, et que s’il était davantage comme Perséphone, il s’inquiéterait du sort de l’humanité. Mais l’humanité se reconstruisait toujours, même après les batailles les plus destructrices.

Il n’y aurait rien à reconstruire s’il la perdait, elle.

Quelqu’un frappa à la porte et il leva la tête vers Ilias.

— J’ai pensé que vous aimeriez voir la une du jour, dit-il en tendant à Hadès un exemplaire du New Athens News, dont la une était une terrible insulte : ENTRETIEN AVEC TH?S?E, LE DEMI-DIEU ? LA T?TE DE LA TRIADE

Apparemment, Hélène avait tenu sa promesse. Hadès parcourut l’article, et sa m?choire se contracta peu à peu en découvrant ses propos biaisés. Le problème était que les mortels ne verraient qu’un homme qui était à moitié humain, quelqu’un qui pouvait combattre les Olympiens et se battre pour les mortels.

Ils verraient leur réalité reflétée dans les paroles de Thésée.

? Pourquoi ne pas laisser les dieux parler d’eux-mêmes ? Je savais qu’il ne faudrait pas longtemps pour qu’un dieu, ou plusieurs, déversent leur colère sur le monde. ?

Peut-être était-ce pour ?a que la situation était aussi exaspérante : il n’avait pas complètement tort.

Si quelque chose allait retourner les mortels contre les dieux, ce serait leurs propres actions, et pour l’instant, la plus grande menace était la tempête de Déméter.

— Son timing est parfait, dit Hadès en jetant le journal dans les flammes.

— Je suppose qu’il doit se sentir sacrément puissant, à l’heure où on parle, acquies?a Ilias.

Hadès supposait que c’était le cas, en effet. Que pouvaient-ils faire pour lui rappeler combien il était insignifiant ? Au bout d’un moment, il se leva et se tourna vers le satyre. En temps normal, il lui donnait une marche à suivre ou un ordre, mais étant donné les circonstances, il ne savait pas quoi faire.

Il avait réellement l’impression de n’avoir aucun contr?le sur rien.

*

* *

Hadès se manifesta dans la clairière d’Hécate. Il n’y était que depuis une fraction de seconde quand il sentit la magie de la déesse déferler sur lui. Elle le prit par surprise et il parvint à se téléporter avant que le coup ne l’atteigne, mais elle avait un coup d’avance et dès qu’il apparut, son pouvoir le percuta en plein torse.

La force de l’attaque le projeta en arrière et il sentit le sol céder sous ses pieds quand il planta les talons dans la terre pour éviter de heurter les parois montagneuses des Enfers.

Il sentit Hécate approcher. Il ne la voyait pas, mais sa magie crépitait dans l’air et hérissait les poils de ses bras.

— Je ne sais pas ce que j’ai fait, grogna Hadès, mais tu pourrais essayer de me parler avant de m’attaquer.

— Peut-être aurais-tu pu faire la même chose avant d’infliger une telle torture à Perséphone.

Sa voix résonnait de tous les c?tés, comme si des centaines d’Hécate l’entouraient.

— Je sais, admit-il. Je suis un imbécile.

— Tu es plus que ?a, répondit-elle en apparaissant devant lui, les bras croisés.

— Tu as fini ?

— Peut-être, dit-elle d’un ton hésitant.

Hadès la fusilla du regard.

— Je sais, et je m’en voulais avant de venir te voir. Maintenant, je me sens encore pire.

— Tant mieux. ? quoi pensais-tu ? demanda-t-elle.

— Comment ?a, à quoi je pensais ? Je l’entra?nais ! Et ne critique pas ma méthode. C’est toi qui l’as poignardée juste pour lui apprendre à se guérir.

— Je la préparais, répondit la déesse. ?tait-ce gentil ? Non. Mais tu as peut-être défait tous nos progrès !

— Quels progrès ? siffla-t-il. Elle a failli se déchiqueter elle-même !

— Elle a peur de détruire le monde entier avec sa magie, et tu as fait de cette peur une réalité.

Hadès détourna les yeux.

— Je ne sais pas quoi faire d’autre, Hécate. On s’apprête à traverser une époque lugubre, et elle n’apprend pas assez vite.

— Tu ne peux pas forcer ses progrès juste parce que tu as peur, Hadès.

Il grin?a des dents.

— Le mieux que tu puisses faire pour elle est de lui offrir un espace de sécurité. C’est auprès de toi qu’elle guérit de ses traumatismes.

— Tu crois que c’est encore vrai ?

— Oui, dit Hécate. Alors va t’excuser auprès de ta reine.

*

* *

Hadès avait promis de ne jamais utiliser son pouvoir d’invisibilité pour espionner Perséphone, et il n’avait pas prévu de se cacher, mais Ivy l’avait prévenu qu’elle n’était pas de bonne humeur et qu’elle avait jeté sa tablette contre le mur. Et maintenant, Leucé était là, parlant de tout et de rien.

Dieux, il était tellement frustré.

La nymphe partit enfin et il en profita avant que quelqu’un d’autre ne les interrompe.

Mais quand il se retrouva face à elle, il en perdit les mots. Sa bouche était sèche et il ne savait pas quoi dire.

Peut-être était-ce à cause de sa fa?on de le regarder, d’un air hésitant et hanté, ou peut-être était-ce à cause de l’atmosphère gênante et tendue.

— Tu as besoin de quelque chose ? demanda-t-elle.

Besoin ? Comme s’il était venu lui demander un verre d’eau. Il tendit le bras derrière lui et ferma la porte à clé.

— Il faut qu’on parle.

Perséphone le dévisagea un moment, puis elle croisa les bras.

— Alors parle !

Il la regarda dans les yeux en s’approchant d’elle. Il s’agenouilla devant elle.

— Je suis désolé, dit-il en la regardant dans les yeux. J’ai été trop loin.

Elle sembla avoir du mal à supporter ses excuses, car elle baissa les yeux, regardant ses doigts qu’elle triturait nerveusement.

— Tu ne m’as jamais dit que tu avais le pouvoir d’invoquer les peurs.

— Y a-t-il eu une occasion d’en parler ?

Perséphone ne répondit rien, mais Hadès avait l’impression que d’une certaine manière il lui avait fait défaut. Ce n’était pas la première fois qu’elle lui demandait de s’ouvrir davantage à elle, mais il lui semblait que certaines choses se révélaient d’elles-mêmes, avec le temps.

— Si tu m’y autorises, j’aimerais t’entra?ner différemment, dit-il. Je laisserai la magie à Hécate et je m’occuperai plut?t de t’aider à étudier les pouvoirs des autres dieux.

Il commencerait par lui-même, même si ?a le mettait mal à l’aise d’y penser, ?a lui semblait être le meilleur moyen de se faire pardonner, puisqu’il avait utilisé contre elle des pouvoirs qu’elle ne connaissait pas.

— Tu ferais ?a ?

— Je ferais n’importe quoi pour te protéger, dit-il. Et comme tu n’es pas d’accord pour rester enfermée aux Enfers, c’est la seule solution.

Elle lui sourit timidement, et Hadès en voulut davantage.

— Je suis désolée d’être partie, dit-elle.

— Je ne t’en veux pas, répondit-il, même si ?a ne lui avait pas plu. J’ai plus ou moins fait la même chose en t’emmenant à Lampri. Parfois, il est difficile d’exister dans le lieu où on a vécu une chose horrible.

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