— On dirait que Poséidon a décidé de venir, finalement, dit Silène.
Dionysos leva la tête et vit un yacht blanc se diriger vers eux, son c?ur se mit à battre plus vite. Il était bondé de gens, presque nus, même si certains étaient en maillot. La musique était à fond et tout le monde semblait danser. Fut une époque où Dionysos aurait prospéré dans un tel environnement, mais c’était il y a longtemps, et cela ne faisait que le remplir d’appréhension à présent. Il lui était facile de se souvenir de la sensation de folie qui accompagnait ces moments, quand l’alcool coulait à flots et la musique pulsait autour de lui.
Il lui fallut quelques secondes pour se débarrasser de ces sensations, mais quand le yacht arriva à quai, il avait repris le contr?le.
L’équipage de Poséidon abaissa la rampe et Silène s’avan?a avec enthousiasme. Dionysos posa une main sur son épaule pour le mettre en garde.
— Pas d’alcool. On n’est pas là pour ton plaisir.
— Je sais, je sais, répondit le satyre en dégageant sa main avant de monter à bord.
Ils se retrouvèrent au milieu d’une orgie. Certains passagers dansaient, mais la plupart prenaient part à divers actes sexuels.
— Par ici, dit un des membres de l’équipage qui avaient abaissé la rampe, en tournant les talons pour traverser la foule.
Dionysos le suivit, tra?nant son père adoptif derrière lui et ne le l?chant que lorsqu’ils furent à l’intérieur du yacht. La cabine était aussi bondée que le pont, mais au moins ses envies de sexe seraient contenues.
La musique était moins forte à l’intérieur, et l’ambiance plus tranquille. Il y avait des gens allongés dans diverses positions sur le sol et les meubles. Installé sur un canapé circulaire, Poséidon les attendait, les bras étendus sur le dossier.
Contrairement aux autres dieux qui cachaient souvent leur véritable forme, Poséidon utilisait rarement son Charme. ? cause de cela, il paraissait luire d’une aura dorée et scintillante. Il portait des manchettes et une couronne dorées à la base de ses cornes en spirale. Dionysos savait que sa forme divine n’était pas une question de confort ; en vérité, cela le rendait plus imposant et plus puissant que quiconque dans la pièce.
— Dionysos, dit Poséidon, les yeux pétillants de malice. Viens, assieds-toi. Viens faire la sieste.
Le dieu du Vin l’ignora et alla droit au but.
— On me dit que tu sais peut-être où se trouve une femme que je cherche, dit-il.
Poséidon pencha la tête sur le c?té, les yeux légèrement plissés.
— T’étais fun, à l’époque. Qu’est-ce qui s’est passé ?
— Tu sais parfaitement ce qui s’est passé, rétorqua Dionysos.
Poséidon l’étudia un moment avant de gonfler ses poumons.
— Tu sais ce qui rend les hommes faibles, Dionysos ?
Le dieu de la Vigne attendit qu’il poursuive, même s’il savait que ses propos ne lui plairaient pas.
— Les femmes. Attends, écoute-moi, dit Poséidon en levant la main pour empêcher Dionysos de parler. Héra t’a dérobé ta sérénité et t’a changé en homme… misérable. Elle t’a rendu faible.
Dionysos serra les poings, sa colère mena?ait de jaillir.
— Ton opinion ne m’intéresse pas, Poséidon. Je suis seulement venu te demander si tu connais une femme qui s’appelle Méduse. Apparemment, la dernière fois qu’elle a été vue, c’était sur ton rivage, et maintenant, elle a disparu.
— Qu’est-ce que j’en sais ? Tant de femmes vont et viennent, répondit Poséidon d’un ton désintéressé.
— Une femme a disparu. Elle a peut-être des ennuis, ou pire, et c’est tout ce que tu trouves à dire ?
Même si Dionysos n’était pas surpris, il n’en était pas moins dégo?té.
— J’ai du mal à comprendre pourquoi tu tiens tant à cette femme. Tu n’en as pas sauvé des milliers au cours de ta mission pour mettre fin au trafic ? Au fait, comment ?a se passe ? demanda le dieu de la Mer avant de marquer une pause en fron?ant les sourcils. Est-ce que tu leur parles de ton passé ? Quand tu les rendais tellement folles qu’elles se jetaient aveuglément sur ta bite ?
— Tu ne sais pas de quoi tu parles, dit Dionysos, bouillonnant de rage.
— Eh bien, peut-être que nous n’avons pas le même souvenir du passé.
— C’était une erreur, dit-il.
Il aurait d? écouter son instinct plut?t que de chercher à faire plaisir à Ariadne.
— La fille que tu héberges chez toi, dit Poséidon. Elle s’est jetée sur ta bite, aussi ?
Dionysos se figea. Il ne comprenait pas pourquoi tout le monde était obsédé par sa verge.
— Depuis quand tu t’intéresses à qui je baise ?
— Je suppose que ?a fait un moment, dit Poséidon d’un ton pensif. Quoi qu’il en soit, je m’en fiche royalement, mais mon fils s’intéresse à qui elle baise, elle.
— Elle n’appartient pas à ton fils.
— Je crois qu’on sait tous les deux que c’est faux.
— Qu’est-ce que tu veux dire, Poséidon ?
— Je dis que je ne crois pas que tu veuilles de nouveau partir en guerre pour une femme. ?a ne s’est pas bien terminé pour toi, la dernière fois.
La dernière fois, Dionysos avait eu l’aide de Zeus, et étant donné que Poséidon soutenait Thésée, il ne pensait pas que le dieu du Ciel interviendrait, cette fois-ci.
— Je ne suis pas venu parler d’Ariadne, dit-il.
— Mais oui. Tu veux savoir ce que je sais à propos de Méduse, répondit Poséidon. Je l’ai baisée et je l’ai laissée. Je ne sais pas ce qui lui est arrivé, après ?a. Peut-être qu’elle a supplié Hadès de mourir. Mais c’est dommage. Si j’avais su la valeur de sa jolie tête, je l’aurais tranchée quand elle était à terre.
Dionysos le fusilla du regard, plantant ses ongles dans sa paume.
Poséidon se pencha en avant, les coudes appuyés sur les genoux, les mains jointes.
— Dis-moi que tu le savais. On dit qu’elle est capable de changer les hommes en pierre, mais seulement après que sa tête a été séparée de son corps, dit-il avant de marquer une pause en esquissant un sourire horrible. C’est typique des femmes, non ? D’être utile seulement quand elles sont mortes.
Chapitre XIX
Hadès
Hadès se réveilla quand Perséphone sursauta à ses c?tés.
— Perséphone ? demanda-t-il en se tournant vers elle alors qu’elle s’asseyait dans le lit.
Elle gigotait, agrippant les draps, le dos arqué.
— Perséphone, répéta-t-il en posant une main sur son ventre pour faire en sorte qu’elle se rallonge, mais elle se débattit en gémissant. Perséphone, réveille-toi, dit-il en la secouant.
Il ne savait pas quoi faire d’autre pour la tirer de son cauchemar, mais elle semblait prise dans ses griffes, incapable de s’en extraire.
Merde.
Il se mit à genoux et tenta de l’immobiliser.
— Perséphone !
Cette fois, elle ouvrit les yeux, sans toutefois sembler se réveiller. Elle se débattit de plus belle, au point qu’il peinait à la tenir en place, même à cheval sur elle.