La saga d'Hadès - Tome 01 : A game of fate

— C’est toi qui m’as demandé ce qui n’allait pas, bougonna Apollon.

— Je t’ai également demandé comment Adonis était mort, dit Hadès. Et tout ce que tu m’as dit, c’est qu’il a été poignardé avec une lame courbe.

— T’as raté le moment où j’ai dit ? plusieurs fois ? ? aboya Apollon.

— Montre-moi le corps, dit Hadès. Montre-moi les plaies.

Apollon l?cha un soupir qui ressemblait à un grognement.

— D’accord, dit-il, la m?choire crispée.

*

* *

Hadès apparut dans un des temples sombres et froids d’Apollon. Celui-ci n’était plus utilisé et se trouvait dans ce qu’on appelait désormais la vieille agora de Nouvelle Athènes. Durant l’Antiquité, c’était un lieu de vie où les citoyens se rassemblaient pour faire la fête, vénérer les dieux, jouer et exposer leurs talents artistiques. Aujourd’hui, après de nombreuses batailles et tempêtes mortelles, ce n’étaient plus que des ruines.

Apollon apparut et bouscula Hadès pour avancer dans un coin de la pièce où une table en métal était poussée contre le mur.

— Tu ne crois pas que tu devrais te changer ? demanda Hadès, car le dieu était encore vêtu de son kimono préféré.

S’il pensait que l’eau l’avait ruiné, est-ce que le sang ne serait pas pire ?

Apollon semblait s’en ficher. Il empoigna le drap blanc taché de sang qui recouvrait le corps d’Adonis et le retira brusquement.

Hadès avait vu beaucoup de cadavres. Beaucoup. Il fut donc surpris de ne pas être préparé à celui-ci.

Il avan?a lentement vers le corps. Maintenant qu’Adonis était lavé, Hadès voyait bien les larges plaies sur son torse ainsi que sur ses bras et ses jambes, et même sur son visage. Autour de chaque lacération, des bleus brun?tres étaient apparus, comme si le tueur avait enfoncé la lame jusqu’à la garde avec plus de force que nécessaire. Hadès avait du mal à imaginer qu’on puisse causer de tels dég?ts avec un couteau lambda.

C’est alors qu’Hadès remarqua qu’une plaie sur le c?té n’avait pas cessé de saigner.

Bizarre.

— Apollon, commen?a-t-il. Tu es s?r qu’il ne reste rien dans ces plaies ?

— J’ai fouillé dans chacune d’entre elles, dit Apollon.

— Alors pourquoi celle-là saigne encore ?

— Les cadavres ne saignent pas, Hadès… répondit Apollon, s’arrêtant après avoir fait le tour du corps pour rejoindre Hadès. Je ne crois pas que ce soit du sang, dit-il.

Il s’avan?a et enfon?a son doigt dans la plaie.

— Tu ne veux pas des gants, ou quelque chose ? demanda Hadès, qui grima?a en entendant le bruit de succion.

Apollon ne répondit rien, il inspectait la plaie.

— A?e ! Putain de merde ! s’exclama-t-il en retirant soudain son doigt.

Il secoua sa main, répandant du sang partout. Hadès se couvrit le visage.

— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-il.

Apollon resta silencieux et il se saisit d’une pince à épiler. Il l’enfon?a dans la plaie et, après quelques secondes, quelque chose tinta sur la table métallique.

Apollon ramassa l’objet et frotta son pouce dessus.

— Qu’est-ce que c’est ? demanda-t-il.

— C’est la pointe d’une faux, répondit Hadès. La pointe de la faux de Cronos.





Chapitre X



Hadès





Hadès conserva la pointe de la faux de Cronos.

Il détestait la sentir contre lui, elle était lourde et chaude, comme si le métal pouvait br?ler le tissu de sa poche et marquer la peau de son torse. Quand il rentra chez lui, il mit sa main dans sa poche, mais le métal était redevenu froid.

Il allait en avoir besoin quand il confronterait Poséidon pour lui demander comment elle s’était retrouvée dans le corps d’un mortel, loin des c?tes de son océan.

La lame était en partie forgée en adamantine et avait été donnée à son père par Ga?a. Elle avait la capacité de blesser le Divin. Cronos l’avait utilisée pour castrer son père, et le sang qui avait coulé sur terre avait donné naissance aux Furies, les déesses de la Vengeance et du Ch?timent.

Quand Zeus avait sauvé Hadès et Poséidon des entrailles de Cronos, ils avaient pris sa faux, l’arme qui symbolisait son pouvoir et provoquait la peur chez les autres dieux, et ils l’avaient jetée au fond de l’océan. Poséidon était un dieu différent, à l’époque, tout comme Hadès et Zeus, mais il n’était jamais trop tard pour avoir des regrets, surtout en voyant le chaos que son frère provoquait désormais avec tant de joie.

Adonis, qui était un mortel, ne pouvait pas survivre à un seul coup, et encore moins aux quatorze qu’il avait re?us. Le plus inquiétant restait que quelqu’un était encore en possession du reste de la lame. Le fait qu’elle soit cassée ne la rendait pas moins puissante.

Et si ces agresseurs s’en prenaient à un dieu ? Même un dieu mineur ?

Quelles choses jailliraient de son sang ?

Les mortels ne comprenaient probablement pas les conséquences du meurtre d’un dieu – Poséidon, si.

Une violente vague de haine noua l’estomac d’Hadès. Il ne comprenait pas à qui elle s’adressait le plus : Cronos ou Poséidon. Quel que soit son objectif, le jeu auquel s’adonnait son frère était dangereux. Il se tramait quelque chose sous la surface du monde. Il existait trop d’armes capables de blesser les dieux ; d’abord l’Ophiotauros, maintenant la faux, et c’était sans parler de la tempête de neige de Déméter, qui n’arrangeait pas l’opinion que les mortels avaient des dieux. Quelle serait la suite ?

Plus il en savait, plus il avait peur pour Perséphone.

Il leva la tête, s’attendant à trouver la déesse endormie, ou même réveillée à l’attendre, mais le lit était vide. Il paniqua un instant avant de se calmer. Il sentait sa présence aux Enfers, caressant sa peau comme si elle était à c?té de lui.

Elle n’était pas loin.

Il sortit de leur chambre et partit à sa recherche dans le ch?teau, la trouvant bient?t dans la cuisine. Elle se tenait devant l’?lot central, occupée à mélanger une p?te dans un saladier.

Elle n’avait pas remarqué son arrivée et il en profita pour l’observer librement, sans le masque qu’elle pourrait mettre pour se cacher.

Il n’aurait pas d? être surpris de la trouver ici, elle aimait faire de la p?tisserie quand elle ne trouvait pas le sommeil. Elle fredonnait doucement en tamisant la farine dans le saladier, s’arrêtant de temps à autre pour boire une gorgée de whisky à la bouteille, qui était presque vide.

Il haussa les sourcils en la voyant boire sans grimacer, se rappelant que la dernière fois qu’elle avait go?té du whisky, elle avait détesté cela. Il se demanda si elle était saoule.

Quand Perséphone eut fini de mélanger sa préparation, elle la versa dans un plat, puis elle la lissa avec une spatule, qu’elle porta ensuite à sa bouche pour la lécher.

Elle fredonna en signe d’approbation et Hadès décida qu’il était temps de lui signifier sa présence, parce qu’il voulait lui aussi savoir si la p?te était bonne, mais il voulait la go?ter sur sa langue.

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