Un Minotaure.
Le monstre rugit et frappa le sol de son sabot, il était armé d’une double hache qui était ébréchée et couverte de sang sec. Hadès supposa que la créature avait d? s’en servir en étant emprisonnée ici, ce qui vu son état, ses cheveux gras et compacts, sa peau répugnante et ses yeux vitreux, devait dater de très longtemps.
Le monstre meugla et balan?a sa hache. Hadès poussa contre le mur avec ses mains et se baissa en propulsant ses spectres sur la bête. Face à n’importe quelle autre créature, sa magie aurait frappé son ?me et elle aurait été désorientée. Pourtant, les ombres traversèrent le Minotaure, et il sembla s’énerver de plus belle, ne perdant l’équilibre que quelques secondes.
Hadès fon?a sur la créature. Ils volèrent en arrière, traversant un mur après l’autre. Ils finirent par atterrir sur un amas de gravats et Hadès roula pour s’éloigner autant que possible de la bête.
Le Minotaure fut aussi rapide que lui et se dressa sur ses sabots. Il ne possédait pas de magie, mais il était agile et semblait puiser sa force dans un puits sans fin. Il rugit et chargea à nouveau, baissant cette fois la tête pour faire usage de ses cornes. Hadès croisa les bras et créa un champ magnétique qui fit voler la créature dans les airs.
Si elle percuta le mur avec force, elle se releva tout aussi vite et, cette fois, son grognement fut assourdissant de rage. Elle jeta sa hache, qui fendit les airs avec un sifflement aigu. Elle se précipita en même temps sur Hadès et le dieu se prépara à affronter l’impact. Quand la créature le percuta, Hadès invoqua sa magie et planta ses longues griffes dans la nuque du Minotaure. Il rugit, mais continua de courir à toute vitesse, traversant les murs du labyrinthe. Les impacts répétés sur le dos d’Hadès commencèrent à se faire sentir. Il crispa sa m?choire et continua de planter ses griffes dans le cou de la bête, encore et encore.
Hadès commen?a à sentir l’énergie du monstre faiblir. Il ralentit et son souffle devint rauque, des tra?nées de sang coulaient de sa bouche et de son nez. Hadès était sur le point de le l?cher quand le Minotaure vacilla et chuta avec lui dans un autre trou. Celui rétrécissait vite et Hadès rebondissait contre les parois comme une balle, ce qui lui coupait le souffle à chaque fois. Ils tournoyèrent l’un autour de l’autre jusqu’à être tous deux projetés dans une salle plus grande. Le monstre atterrit le premier et Hadès frappa une paroi qui ne céda pas, lui indiquant que ce n’était ni du béton ni de la pierre.
De l’adamantine, comprit Hadès.
L’adamantine était un matériau qui avait été utilisé pour fabriquer de nombreuses armes anciennes. C’était également le seul métal qui pouvait neutraliser les dieux.
Hadès se leva d’un bond, prêt à continuer de se battre contre le Minotaure, mais celui-ci ne se releva pas.
Il était mort.
Hadès s’habitua à cette nouvelle pénombre. Elle était étrangement plus épaisse. Peut-être était-ce à cause de la profondeur à laquelle il était, peut-être à cause de l’adamantine. Quoi qu’il en soit, la cellule était simple, une petite pièce carrée avec un sol sablonneux. ? première vue, il n’y avait pas d’issue, mais il continuerait de chercher. Pour l’instant, il se concentra sur la présence de Perséphone, qui était très forte ici, comme si son c?ur battait dans les murs de cette cellule. C’est à ce moment-là qu’il le vit, l’éclat de l’un des joyaux de sa bague.
Si sa bague était ici, où était-elle ? Qu’avait fait Thésée ?
Il la fixait toujours quand un bruit mécanique retentit, il leva la tête au moment où un filet tomba du plafond et le plaqua au sol. Il percuta le sable dans un craquement sonore et essaya d’invoquer sa magie, mais il se mit à convulser, le filet le paralysait.
Jamais il ne s’était senti aussi impuissant, et cela le mit hors de lui.
Il se débattit et jura, en vain. Il finit par ne plus bouger, non pas parce qu’il ne voulait plus se battre mais parce qu’il était trop épuisé pour le faire. Il ferma les yeux un instant. Quand il les rouvrit, il eut la sensation de s’être endormi. Il lui fallut un moment pour s’adapter à la pénombre. Allongé sur le sol, le souffle court, il remarqua un minuscule éclat à quelques pas de lui.
La bague de Perséphone.
Il voulut la saisir, mais le filet immobilisait son bras. Son front se couvrit de sueur et son corps perdit encore de la force. Encore une fois, il ferma les yeux. Le sable recouvrit sa bouche et sa langue.
— Perséphone, chuchota-t-il.
Sa femme, sa reine.
Il se remémora combien elle avait été sublime, vêtue de blanc, quand elle avait marché jusqu’à lui dans la clairière, entourée des ?mes et des dieux qui l’aimaient. Il se souvint de son sourire qui avait fait battre son c?ur plus fort et de ses yeux émeraude brillant de joie, et sa poitrine se comprima de fierté. Il pensa à tout ce qu’ils avaient enduré, tout ce pour quoi ils s’étaient battus, aux promesses qu’ils s’étaient faites de br?ler les mondes et de s’aimer pour toujours. Mais Hadès se retrouvait ici, sans elle, sans savoir si elle était en sécurité.
Il contracta sa m?choire, une nouvelle vague de colère parcourut ses veines. Il se for?a à ouvrir les yeux et tendit à nouveau la main vers la bague. Cette fois, même si sa main trembla, il parvint à lutter et à saisir une poignée de sable, qu’il laissa couler entre ses doigts pour n’avoir plus que la bague dans sa paume.
? bout de souffle, tremblant de tout son corps, il porta le bijou à sa bouche puis le serra dans sa main, contre son c?ur, avant de sombrer à nouveau dans les ténèbres.
Note de l’auteure
Je n’ai que quelques ajouts à faire dans cette note, car la plupart des éléments mentionnés dans A Game of Gods le sont aussi dans A Touch of Malice. Si vous n’aviez pas lu la note de l’auteur à la fin de ce dernier, je vous invite à y jeter un ?il, car il explique brièvement nombre des mythes qui m’ont servi de référence dans ces deux romans.
L’OPHIOTAUROS
Il n’y a que peu d’informations au sujet de l’Ophiotauros, en dehors du fait que c’était un monstre mi-taureau, mi-serpent, probablement né de Ga?a. Son existence était accompagnée d’une prophétie : ? Celui qui aurait livré aux flammes du sacrifice les chairs de ce taureau pourrait vaincre les dieux éternels. ? Parfois, l’histoire veut que les Titans aient tué le monstre, mais Ovide dit que c’est Briarée. Il est sur le point de livrer ses intestins aux flammes quand les aigles de Zeus les lui dérobent.
Après sa mort, l’Ophiotauros est placé dans les étoiles et forme la constellation du Taureau.
Cette histoire ferait partie de Titanomachie, qui est un poème épique grec perdu au sujet de la Guerre des Titans.