— L?che ton Charme, ordonna-t-il d’une voix douce.
Elle obéit sans hésiter et il sentit sa magie s’échapper. Il aimait la voir se transformer et il imaginait qu’il en était de même pour elle. Ils étaient si rarement sous cette forme ensemble que cela avait quelque chose d’érotique et d’interdit.
— Une dernière chose, dit-il en levant les deux mains, faisant appara?tre une couronne en métal.
— Tu n’essaierais pas de prouver quelque chose, Milord ? demanda-t-elle quand il la pla?a sur sa tête.
— Je pensais que c’était évident.
— Quoi, que je t’appartiens ? s’enquit-elle en le dévisageant.
— Non, répondit-il. Que nous nous appartenons l’un à l’autre.
Il l’embrassa tendrement, ne révélant rien du désir qui embrasait son sang. La voir ainsi était un rêve.
— Tu es sublime, ma chérie, déclara-t-il d’une voix calme et pleine d’admiration.
Elle était sereine en étudiant son visage, et il s’inquiéta de ne pas pouvoir déchiffrer son expression.
Il caressa tendrement sa joue.
— Tu vas bien ?
— Parfaitement, oui, répondit-elle en lui offrant un sourire qui n’était pas tout à fait sincère.
Elle redoutait sans doute de devoir affronter les Olympiens, et il ne pouvait pas lui en vouloir. Interagir avec eux et ne pas se laisser piéger par leurs jeux manipulateurs était épuisant. Cette soirée allait être difficile pour Hadès, et encore pire pour elle.
— Tu es prêt ?
— Je ne suis jamais prêt pour aller à Olympe, répondit-il. Reste à mes c?tés.
Il l’emmena dans la cour d’Olympe où s’étaient tenues les funérailles de Tyché. Loin au-dessus de leurs têtes, au sommet de la montagne, se dressait le Temple du Soleil, d’où provenait une cacophonie de musique et de voix qui s’annon?ait déjà gaie et épuisante.
Il se demanda si Hélios allait se joindre aux festivités, étant donné que c’était dans ce temple qu’il avait l’habitude de séjourner pendant la nuit, après être rentré de son voyage dans le ciel. Hadès redoutait de le voir, mais il présumait que le dieu du Soleil serait là. Peu importait qu’il déteste Hadès, les dieux se rassemblaient toujours quand il y avait du vin, de l’ambroisie et la possibilité d’un coup de thé?tre.
— Je suppose que c’est notre destination ? demanda Perséphone.
— Hélas.
Il s’y serait téléporté, mais il n’était pas pressé d’arriver. Et puis, s’ils marchaient, Perséphone verrait un peu d’Olympe avant d’affronter ses habitants, ce qui leur ferait du bien à tous les deux.
Ils entamèrent la montée, et si les résidences des dieux ne l’intéressaient pas particulièrement, il aima observer Perséphone qui en appréciait la beauté. Ce n’était pas qu’Hadès ne reconnaissait pas la splendeur des villas, mais ce n’était pas une chose à laquelle il accordait de l’importance. C’était un royaume au sommet du monde, qui ne servait qu’à rappeler aux mortels ce qu’ils ne pourraient jamais avoir. Au moins dans son royaume, une vérité restait immuable : tout avait une fin.
Ils arrivèrent au Temple du Soleil au bout de quelques minutes de marche.
Il avait essayé de s’y préparer, mais il n’avait pas eu assez de temps, et c’était bien pire qu’il ne l’avait imaginé. Il y avait trop de monde. Tous étaient réunis sur le porche du temple, et ils parlaient tous en même temps.
Il détestait ?a.
Un silence s’abattit sur l’assemblée et tous les regards se posèrent sur eux.
Il détestait encore plus ?a.
? ses c?tés, Perséphone lui serra la main et quand il tourna la tête vers elle, elle lui souriait. Elle avait un air… enchanteur.
— Il semblerait que je ne sois pas la seule à ne pas pouvoir te quitter des yeux, mon amour, chuchota-t-elle. L’assemblée entière est sous ton charme.
Il sourit jusqu’aux oreilles.
— Mais, chérie, c’est toi qu’ils regardent.
Hadès per?ut la crainte qui grandissait au fur et à mesure qu’ils avan?aient et que la foule se séparait pour les laisser passer. Ceux qui étaient réunis là étaient des dieux mineurs, des Favoris, des nymphes, des satyres et d’autres serviteurs des Olympiens. Comme les mortels, ils avaient tous un avis sur lui. Certains étaient indifférents, la plupart avaient peur.
— Sephy !
Perséphone l?cha la main d’Hadès, pour se retourner vers Hermès, qui traversait la foule jusqu’à eux. Il était vêtu d’un costume jaune citron brodé de fleurs.
C’était sans doute la chose la plus moche qu’Hadès ait jamais vue.
— Tu es canon ! dit-il en prenant ses mains dans les siennes et en les levant pour étudier sa robe.
— Merci, Hermès, mais c’est le travail d’Hadès que tu complimentes. C’est lui qui a créé la robe.
Il y eut quelques cris de surprise dans la foule, suivis d’un brouhaha de murmures.
Personne n’avait cessé de les regarder et de les écouter depuis leur arrivée.
— Bien évidemment, et dans sa couleur favorite, remarqua Hermès d’un air enjoué.
— En fait, Hermès, le noir n’est pas ma couleur préférée.
Il y eut d’autres chuchotements et Hadès eut l’impression d’entretenir une conversation avec toute la foule.
— Alors c’est quoi ? cria quelqu’un.
Hadès esquissa un sourire avant de répondre.
— Le rouge.
— Le rouge ? demanda quelqu’un d’autre. Pourquoi le rouge ?
Hadès regarda Perséphone en la prenant par la taille.
— Je crois que j’ai commencé à aimer le rouge quand Perséphone a porté une robe de cette couleur au Gala olympien.
Il y eut quelques soupirs, mais une voix résonna par-dessus le bruit de la foule.
— Qui aurait cru que mon frère était aussi romantique ? demanda Poséidon en riant sèchement.
Hadès n’avait pas vu son frère depuis qu’il avait emmené Dionysos sur son yacht pour sauver Ariadne. Il se tenait face à lui, Amphitrite suspendue à son bras, et Hadès se demanda si sa femme était au courant de leur dernière entrevue et des menaces horribles qu’il avait formulées.
— Ignore-le, dit Hermès. Il a bu trop d’ambroisie.
— Ne lui trouve pas d’excuses, dit Hadès. Poséidon a toujours été un enfoiré.
— Frangin ! gronda Zeus.
Hadès prit une profonde inspiration pour se préparer à l’affronter. Zeus fendit la foule jusqu’à eux et frappa Hadès dans le dos. Il avait l’air joyeux et exubérant. Soit il était saoul, soit ses testicules avaient commencé à repousser.
— Et la sublime Perséphone. Ravi que vous ayez pu venir.
— Nous avons cru comprendre que nous n’avions pas le choix, dit Perséphone.
Zeus éclata d’un rire tonitruant.
— Tu déteins sur elle, frangin, ricana-t-il en mettant un coup de coude dans les c?tes d’Hadès.
Son regard avait un éclat de colère, comme si le ton de Perséphone ne lui avait pas plu. Hadès s’en fichait, il l’avait adoré.
— Pourquoi ne seriez-vous pas venus ? C’est le festin de vos fian?ailles, après tout !