La saga d'Hadès - Tome 01 : A game of fate

— Je crois que le mot que tu cherches, c’est hubris, dit Okéanos. N’est-ce pas ce que vous aimez punir, vous autres Olympiens ? Ce soi-disant défaut fatal de l’humanité ?

Les dieux avaient rarement à punir l’hubris, car les conséquences arrivaient d’elles-mêmes, comme c’était le cas d’Okéanos, qui semblait toutefois l’ignorer.

— Pourquoi Tyché ? demanda Hadès.

Okéanos haussa les épaules.

— ?a paraissait être une bonne chose.

— Vous avez ritualisé la mort d’une déesse qui ne vous avait fait aucun mal, rétorqua Hadès d’une voix tremblante.

— Il y a toujours des victimes collatérales dans une guerre, Hadès.

— Tu es bien placé pour le savoir, remarqua le dieu des Morts.

Il avait beau être arrogant, Okéanos semblait oublier qu’il était mort, lui aussi.

— Eh bien, peut-être qu’aucun de nous deux n’en serions là si tu n’avais pas baisé avec la mauvaise femme.

Hadès frappa à nouveau Okéanos. Cette fois, ses dents se plantèrent dans sa peau, mais les coupures se refermèrent aussi vite qu’elles s’étaient formées.

— Il se fout de ta gueule, Hadès, dit Hermès.

— Tu ne sais même pas combien tu es responsable.

Le demi-dieu éclata d’un rire sifflant.

Hadès leva à nouveau le poing, mais Hermès le retint avant qu’il n’ait pu le frapper, le regardant dans les yeux.

— Permets-moi, dit-il en se tournant vers le demi-dieu. Tu sembles avoir oublié ta force. Laisse-moi te le rappeler.

Okéanos ricana.

— Frappe aussi fort que tu peux, bandit.

— Je vais faire mieux que ?a… frangin, dit Hermès.

D’un revers de la main, la chaise disparut de sous les fesses d’Okéanos, mais avant qu’il tombe, Hermès saisit son bras et le plia dans son dos jusqu’à ce que les os craquent.

Le demi-dieu tomba par terre en hurlant, les dents serrées, mais il parvint tout de même à parler.

— Vous avez peut-être de la force, mais nous avons les armes.

— On a entendu ?a, ouais, répondit Hadès. Et si tu nous en disais plus ?

Okéanos secoua la tête, le souffle rauque et laborieux.

— Mais non, ne t’arrête pas de parler maintenant, dit Hermès en reculant davantage son bras. On arrivait justement au plus croustillant.

Le cri de douleur d’Okéanos résonna dans la salle. Il fallut un moment pour qu’il se change en sanglots.

— T’as rien à dire ? demanda Hermès.

Il s’apprêtait à tirer de nouveau sur son bras lorsqu’il parla.

— Non ! Non ! Attends ! cria-t-il, face contre terre. S’il vous pla?t. Je vous en supplie. S’il vous pla?t.

— Bon, puisque tu l’as demandé gentiment… dit Hermès.

— Il y a un entrep?t dans le quartier des Lacs. C’est là que sont fabriquées les armes. Les attaques… c’étaient des tests pour voir si elles marchaient.

— Tu veux dire que c’étaient des… entra?nements ? demanda Hermès d’une voix lugubre, contenant à peine sa colère.

— Le but a toujours été de provoquer un Olympien, admit Okéanos.

— Quel Olympien ?

— Au début… Aphrodite, cracha Okéanos.

Hermès et Hadès se regardèrent.

— Pourquoi ?

— Parce que Déméter l’a ordonné. C’était son prix en échange de l’usage de sa magie.

Hadès avait soup?onné Déméter de fournir leurs armes à la Triade, mais il ne s’attendait pas à ce qu’elle ait ordonné les attaques contre Adonis et Harmonie. Cela dit, maintenant qu’il y réfléchissait, ce n’était pas très étonnant. C’était à cause d’Aphrodite qu’Hadès avait abordé Perséphone cette nuit-là, à Nevernight. Elle l’avait défié de se débrouiller pour qu’une femme tombe amoureuse de lui, et c’était pour ?a qu’il avait piégé la déesse du Printemps dans un contrat qui l’obligerait à venir aux Enfers presque tous les jours.

Hadès fron?a les sourcils. Ce qu’Okéanos disait était vrai : il était responsable.

— Dans ce cas, pourquoi Tyché ? demanda Hermès en levant plus haut son bras.

— Je ne sais pas, gémit le demi-dieu. Mais le combat de Déméter est contre les Moires.

— Et bien voilà, ce n’était pas si compliqué, dit Hermès.

Il tira alors le bras d’Okéanos, l’arrachant du reste de son corps comme si ce n’était qu’un bout de papier. Le demi-dieu gigotait à leurs pieds, Hermès jeta le bras qui atterrit lourdement aux pieds d’Hadès.

Ce dernier regarda Hermès dans les yeux, notant son visage maculé de sang, parlant assez fort pour se faire entendre par-dessus les cris gutturaux du demi-dieu.

— Fais-en ce que tu veux, dit Hadès, mais je veux que cet entrep?t soit détruit. Et tant que tu y es… réduis ce club en cendres, aussi.

— ?a roule, dit Hermès avant de saisir l’autre bras d’Okéanos, mais Hadès partit avant qu’il ne le lui arrache également.

*

* *

Hadès se déshabilla et s’allongea dans le lit avec Perséphone, la regardant dormir en repensant aux propos d’Okéanos. La nouvelle que Déméter était derrière les attaques contre Adonis, Harmonie et Tyché allait la dévaster.

C’était une chose que de soup?onner l’implication de sa mère, mais c’en était une autre qu’elle soit confirmée.

Hadès se demandait parfois comment quelqu’un pouvait à ce point détester une autre personne, mais Déméter continuait de le ha?r – tout ?a parce que les Moires avaient entremêlé son destin avec celui de Perséphone. Ce qui était pour lui un cadeau était pour Déméter la plus grande malédiction qui soit.

Perséphone remua et le c?ur d’Hadès se mit à battre plus fort quand elle se tourna vers lui. Il avait conscience d’avoir trop pris ces moments pour acquis et se jura de ne plus jamais le faire. Une part de lui était en colère de ne pas pouvoir vivre tranquillement, en sachant qu’elle serait pour toujours à ses c?tés.

— Tu es réveillée, dit-il d’une voix douce.

Elle lui sourit, comme si cela l’amusait.

— Oui. Tu as dormi ?

— ?a fait un moment que je suis réveillé, répondit-il alors qu’il n’avait pas fermé l’?il.

Il tendit la main et caressa ses lèvres du bout des doigts.

— Te regarder dormir est une bénédiction, dit-il.

Elle se rapprocha et il la prit dans ses bras, elle posa sa tête sur son torse.

— Est-ce que Tyché a traversé le Styx ? demanda-t-elle.

— Oui. Hécate l’a accueillie. Elles sont très bonnes amies.

Ils restèrent silencieux un moment, confortables dans leur chaleur respective. Il aurait aimé rester comme ?a pour toujours, coincé sous le poids de Perséphone, mais il savait qu’ils manquaient de temps. Les attaques contre le Divin s’aggravaient, et Perséphone n’arrivait toujours pas à contr?ler son pouvoir. Il repensa à ce qu’Hécate lui avait dit après la catastrophe du club. Elle s’en serait très bien sortie si elle l’avait canalisé correctement.

— J’aimerais m’entra?ner avec toi, aujourd’hui, dit Hadès.

— ?a me plairait.

— J’en doute, dit-il en fron?ant les sourcils, dubitatif.

Il n’avait pas l’intention de rendre ?a amusant. Quand elle l’affronterait, ils seraient comme des ennemis sur un champ de bataille.

Elle ne le reconna?trait pas.

Perséphone leva la tête pour le regarder.

— Pourquoi tu dis ?a ?

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