La saga d'Hadès - Tome 01 : A game of fate

— Je te crois, dit-elle d’une voix douce.

Elle le regarda derrière ses longs cils et cette étrange timidité refit surface.

— C’est… rassurant, en fait.

— Viens, dit-il avant de prononcer des mots qu’il n’aurait jamais pensé dire. Aphrodite nous attend.

*

* *

Ils retournèrent sur l’?le de Lemnos, apparaissant cette fois devant une grande villa moderne. Le fait qu’Hadès n’ait pas pu les téléporter à l’intérieur en disait long sur l’humeur d’Aphrodite. Ils avaient dépassé le stade de l’urgence et se trouvaient désormais sur le chemin de la vengeance, mais il était hors de question qu’elle se serve de Perséphone pour y parvenir.

— On ne pourrait pas se téléporter directement à l’intérieur la prochaine fois ? demanda Perséphone en frissonnant à ses c?tés.

— On pourrait, dit-il, si on y avait été invités.

— Comment ?a ? Aphrodite ne t’a pas prévenu qu’Harmonie était réveillée ?

Hadès ne voulait pas répondre parce qu’il avait l’impression de ne pas pouvoir mentir.

— Hadès… gronda Perséphone d’un ton désapprobateur.

— Elle a envoyé Hermès te chercher. Et c’est moi qu’il a trouvé, admit-il avant de la regarder dans les yeux. Tu ne feras pas ?a sans moi, ajouta-t-il.

La bouche de la déesse se pin?a et elle fuit son regard, mais pas avant qu’il comprenne que ses propos l’avaient vexée. Merde.

— Perséphone… l’implora-t-il, mais la porte s’ouvrit sur Lucy.

C’était l’une des créations d’Hépha?stos, une animatronique presque humaine qui s’occupait de leur maison.

— Bienvenue, dit-elle. Milord et Milady n’attendent pas d’invités. Veuillez me donner vos noms, s’il vous pla?t.

Hadès entra dans la maison sans attendre.

— Excusez-moi ! cria-t-elle. Vous entrez dans la résidence privée de Lord et Lady Hépha?stos !

Il avait déjà traversé le hall d’entrée quand il entendit Perséphone parler.

— Je suis Lady Perséphone dit-elle. Et lui, c’est Lord Hadès, ajouta-t-elle avec autant de dédain que possible.

Le dieu des Morts se tourna vers elle.

— Viens, Perséphone.

Elle croisa les bras et le fusilla du regard.

— Tu pourrais être plus poli. Tu n’as pas été invité, toi, tu as oublié ?

Hadès contracta sa m?choire. Dieux, était-elle vraiment obligée d’être aussi têtue ?

— Lady Perséphone ! s’exclama Lucy d’une voix stridente qui était censée ressembler à de la surprise. Vous êtes la bienvenue. Suivez-moi, s’il vous pla?t.

Elle laissa Perséphone entrer avant de se diriger vers Hadès, haussant le menton en passant devant lui.

— Lord Hadès, vous n’êtes pas le bienvenu, dit le robot.

Elle était clairement à l’image d’Aphrodite.

Hadès embo?ta le pas de Perséphone et lui prit la main, frustrée qu’elle essaie de la retirer. En temps normal, il l’aurait laissée faire, mais cette fois il ne le put pas, sans comprendre pourquoi. Il s’y agrippa et dessina des cercles sur sa peau avec son pouce jusqu’à ce qu’elle semble se détendre.

Hadès n’avait pas l’habitude de venir chez Aphrodite et Hépha?stos. En général, lorsqu’il leur rendait visite, ils l’accueillaient dehors. Pour un couple qui semblait rarement s’entendre, leur espace paraissait être un équilibre parfait de leurs personnalités : le c?té luxueux d’Aphrodite et le c?té pratique d’Hépha?stos.

Lucy les emmena au bout d’un couloir lumineux, jusqu’à la bibliothèque, s’arrêtant pour annoncer leur arrivée avant de les laisser entrer.

— Milady Aphrodite, Lady Harmonie… Lady Perséphone et Lord Hadès sont là pour vous voir.

Aphrodite était assise à c?té de sa s?ur sur un petit canapé. Harmonie faisait moins peur à voir que la veille, mais c’était seulement parce qu’Apollon avait réussi à soigner ses plaies et ses bleus et qu’elle avait débarrassé son corps et ses cheveux des traces de terre. Elle était toujours p?le, presque grise, comme le teint des ?mes quand elles entraient aux Enfers pour la première fois. Quant à ses cornes mutilées… elles portaient encore les traces de la scie qui les avait coupées.

— Merci, Lucy, dit Aphrodite, et l’animatronique esquissa une révérence avant de sortir.

La déesse de l’Amour riva un regard agacé sur Hadès.

— Je vois qu’Hermès n’a pas suivi mes instructions.

— Tu peux remercier Apollon pour ?a, répondit Perséphone.

— Perséphone et moi sommes ensemble dans cette histoire, Aphrodite, ajouta Hadès d’un ton sec.

Harmonie ne réagit pas en entendant leur échange. Elle garda une main sur son chien, qui dormait sur ses cuisses.

— Perséphone, assieds-toi, je t’en prie, dit Aphrodite d’un ton mielleux.

Sa gentillesse était fausse et Hadès espéra que Perséphone le devine.

— Tu veux du thé ? poursuivit Aphrodite.

— Oui, répondit Perséphone en frissonnant.

Hadès fron?a les sourcils. Avait-elle encore froid ?

— Du sucre ?

Hadès croisa les bras, perdant patience devant l’hospitalité d’Aphrodite. Ce n’était qu’une ruse.

— Non merci.

— Un sandwich au concombre ?

— Non merci, répéta Perséphone.

Un silence s’ensuivit, pendant lequel Perséphone but son thé.

— Je suppose que tu es là pour me parler, dit Harmonie d’une voix si faible qu’elle était presque inaudible.

— Si tu te sens assez bien pour le faire, répondit Perséphone. Nous avons besoin de savoir ce qui s’est passé hier soir.

Harmonie regarda Hadès et Perséphone tour à tour.

— Par où je commence ?

— Où étais-tu quand tu as été agressée ? demanda Hadès.

— J’étais dans le Parc Concorida.

— Malgré la neige ? demanda Perséphone.

— J’y vais tous les après-midi avec Opale, expliqua-t-elle. On a pris notre chemin habituel. Je n’ai rien senti d’étrange avant l’attaque, ni violence ni animosité.

Le fait qu’Harmonie ait l’habitude de se promener dans le parc et de suivre le même chemin signifiait que quelqu’un connaissait sa routine et avait pu organiser l’attaque. Et à cause de la neige, il n’y avait probablement pas de témoins.

— C’est arrivé comment ? demanda Hadès. Quel est ton premier souvenir ?

— Quelque chose de lourd m’a ensevelie. Quoi que ?a ait été, cela m’a mise à terre. Je ne pouvais ni bouger ni invoquer mes pouvoirs.

Elle marqua une pause et sa main se mit à trembler sur Opale.

— Après ?a, ?a a été facile pour eux. Ils sont sortis des bois, masqués. Ce dont je me souviens le plus est la douleur dans mon dos. Quelqu’un a planté son genou dans mon dos pour me maintenir à terre, puis ils ont saisi mes cornes et les ont sciées.

— Personne n’est venu t’aider ? demanda Perséphone.

— Il n’y avait personne, répondit Harmonie. Il n’y avait que ces gens qui me détestaient pour ce que je suis, alors que je ne peux rien y faire.

Hadès était gêné de poser la prochaine question, mais il fallait que quelqu’un le fasse.

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